Dans la douceur neigeuse

02/03/2021

 Dehors, il fait froid et sec. Ce soir le ciel s'est rosé doucement pour laisser place à ces lumières entre chiens et loups. Lorsque l'on met son nez à la fenêtre, cela sent l'hiver, une odeur si particulière qui me ramène, à chaque fois, à mon enfance, où mon adolescence. On disait, parfois, cela sent la neige. Elle ne venait pas toujours. Pourtant je me souviens d'un matin où, à mon réveil, tout était blanc, immaculé et le silence était palpable, d'une densité incroyable. J'étais petite, peut-être six ans, non, plutôt cinq. On m'a emmitouflée, je me sentais comme un petite bonbonne, gauche et maladroite. Ce n'était pas des gants, mais des moufles, qui me protégeaient les mains. Ma mère les avaient liées à mon manteau, elles étaient cousus à un grand ruban qui passaient d'une manche à l'autre par le dos du manteau. Je perdais toujours mes moufles. Je perdais bien souvent mes affaires, une grande rêveuse dès mon enfance, pas bien encrée sur le plancher des vaches, mais toujours un peu ailleurs, à me balader dans d'autres mondes, ou, à emmagasiner toutes les sensations qui se présentaient dans la journée. Nous sommes sortis, toute la famille réunie. Non, peut-être pas ma mère, je ne me souviens pas d'elle, dehors avec nous, ce jour là. Je me souviens de courses vacillantes, de mes petites jambes, s'enfonçant plus profondément que les grandes jambes de mon père dans la profondeur ouatée, et humide, du blanc encore totalement immaculé.de la neige. Elle se soulevait et virevoltait, légère, sous la course plus assurée de mes deux grandes sœurs. Je me souviens de leurs rires raisonnant dans tout ce silence blanc. Mon nez était froid, et mes joues me piquaient. Mon rire aussi raisonnait dans cette grande étendue ouatée, sur laquelle mes sœurs étaient entrain de faire de la luge, improvisée, sur deux sacs poubelles. Nous n'étions pas à la montagne, nous étions à la maison en région parisienne, à la frontière de la vallée de Chevreuse, dans une résidence perdue au milieu de la forêt. Petit à petit, les enfants sont sortis des immeubles et nous ont rejoint. Mon père était là, immense à mes yeux, au milieu des rires et du chahut joyeux qui se développait sous ses yeux, son sourire illuminait ceux-ci.. Et dans l'air il y avait cette odeur si particulière du froid de l'hiver, cette lumière douce et mélancolique. Il me manque quelques couleurs, comme si le temps, et ce souvenir lointain, les avait estompées. Il persiste ce sentiment de joie profonde, et simple, d'une journée totalement enchantée parce que recouverte par la neige et nos jeux d'enfants insouciants. Une vraie journée d'enfance.   

Décembre 2019