LES PLACARDS / Episode 7

07/06/2021

 - Hurlement terrifiant

- Qu'est ce qu'il se passe ? Tu t'es blessé ?

- Sanglot de rage.

- Répond moi ! ... Je t'en supplie, répond moi Je savais bien, que tout cela finirait mal. Mais parle moi !

- Gargouillis inaudibles

- Je vais sortir de mon placard. D'accord ? A trois, je sors pour te rejoindre. Un, deux ...

- J'ai rien de cassé ! Mon corps va bien. Ne bouge pas.

- D'accord. Tu es sûr ? Ça m'angoisse tout ça, ça m'angoisse.

- Je vais les ratatiner, les aplatir, les laminer, leur faire bouffer toutes leurs paperasses infâmes, les coller dans un coma artificiel un tube bien planté dans la gorge, pour qu'ils arrêtent de nuire, pour qu'ils ressentent dans leur chair, tout le malheur du monde, qu'ils ont semé et qu'ils continuent de semer !

- C'est atroce ce que tu dis.

- On nous a ordonné le confinement, alors par solidarité, je confine totalement, je confine absolument, je confine sans relâche, sans concession, dans une abnégation exemplaire. Parce que je ne peux pas être directement dans la tourmente, je n'ai pas les compétences pour le faire, je confine le cœur rempli de force pour tous les êtres qui n'en ont plus.

- Calme toi, tu vas faire une attaque Ça m'angoisse tout ça, ça m'angoisse.

- Et eux ils... Et ...

- Et quoi ?

- Et eux, Ils bafouent tous les acquis sociaux de 1936 ceux de 45, et des années 80 ! Ils profitent d'une hécatombe humaine à venir, et de l'enfermement des corps encore vivants, pour continuer à mettre en place un monde sans pitié, terrible et destructeur, qui ne profitera qu'à un tout petit nombre. Je les hais d'être en totale impuissance, à confiner dans ce placard merdique !

- C'était à prévoir.

- C'est tout ce que cela te fait ?

- Tu m'a convaincu de confiner. mais depuis le début, tu le sais bien, je confine mal. Je n'ai pas commencé mon confinement en toute sérénité, en me disant, je m'isole du monde et je le laisse aux mains de dirigeants bienveillants. Non, je m'isole du monde et je l'abandonne, hélas, à des humains effrayants. Toutes les luttes se sont tuent. Et nous voilà dans le noir de nos placards, à faire bonne figure, pour que le pire s'éloigne (Silence ). Il faut que l'on dorme,pense à dormir les jambes en l'air, comme tu me l'as conseillé, il faut que le sang circule, au sortir de nos confinements, elles vont nous être utiles, nos jambes.

(Sanglots étouffés).

- S'il te plait, ne pleure pas. Je ne peux pas te prendre dans mes bras. Ça m'angoisse tout ça. Ça m'angoisse et je confine mal. Avec toi, mon confinement s'embellissait. S'il te plait, ne pleure pas.

- (Les sanglots s'arrêtent).

Le 21 mars 2020. Loi d'urgence sanitaire.